“La plupart des problèmes du monde viennent d’erreurs linguistiques et de simples incompréhensions. Ne prenez jamais les mots dans leur sens premier. Quand vous entrez dans la zone de l’amour, le langage tel que nous le connaissons devient obsolète. Ce qui ne peut être dit avec des mots ne peut être compris qu’à travers le silence.”
– Shams de Tabriz –
On dit que la vie ne se compte pas avec le temps que nous avons passé sur cette planète mais, avec les moments qui nous ont coupé le souffle, comme si que le temps est insignifiant jusqu’à ce qu’il s’arrête, telle une pause temporelle pour cesser de vivre et commencer d’exister. Mais, quand le hasard vicieux de la vie nous met à la rencontre de nos souvenirs déguisés en chair et os, les mots, à leur tour, deviennent insignifiants…
Un lourd silence s’imposa, les mots fuyaient la scène comme s’il renonçaient à assumer leur unique mission dans cette existence, par crainte d’échouer à exprimer le ressentiment si oppressant d’un chagrin lointain, d’une histoire inachevée qui vient d’être réssuscitée, cédant la place à une conversation muette ; à ces regards hésitants qui se cherchent dans la discrétion, à ces paroles incertaines qui meurent prématurément, à un langage sans voyelles ni consonnes.
Embarrassés dans le même tourment, aucun d’eux n’osa rompre cet imprévisible deuil et écrire les dernières pages de ce roman, ils fuyaient leur sort tels les mots fuyaient cette scène, et refusaient d’achever le destin de cet amour comateux qui sombra éternellement entre la vie et la mort.